Lire la 1ère partie de cet article « Surdité et Accessibilité ».
Voici avec un peu de retard la suite de l’article « Surdité et Accessibilité », où je vais m’intéresser aux problèmes rencontrés par les sourds sur Internet.
Il faut bien comprendre au départ que la surdité est un monde à part avec un culture qui lui est propre. Un sourd qui signe la LSF, c’est une personne qui parle une autre langue avec un autre alphabet et une structuration syntaxique différente.
L’accès au multimédia
L’accès à la vidéo est un problème majeur rencontré par les sourds sur Internet. C’est un énorme paradoxe car un moyen de rendre accessible aux sourds du contenu sur Internet est de passer par la vidéo.
Ainsi donc, les sites de partage de vidéos comme Youtube, Dailymotion ou encore MySpaceTV attirent énormément les sourds car tout y est visuel. Mais au-delà de cela, tous les contenus qui y sont proposés ne sont pas accessibles.
Pour rendre une vidéo accessible, il faut au moins la sous-titrer et au mieux proposer une alternative en langue des signes.
Le problème est qu’il est très long et très fastidieux de réaliser des sous-titres pour la vidéo. Retranscrire et synchroniser des dialogues et des sons s’avère être un vrai métier qui n’est pas à la portée de tous. De plus, c’est une opération qui peut difficilement être automatisée et nécessite de toute façon l’intervention humaine.
L’alternative aux sons dans les vidéos est par conséquent toujours négligée au détriment des sourds.
Ceci dit, avec la mode des séries américaines du style de Desperate Housewives, Lost ou Dexter, les sourds sont à la pointe des nouveautés. Grâce aux communautés florissantes de fans qui sous-titrent ces séries dès le lendemain de la sortie des épisodes, les sourds peuvent surfer sur ce mouvements et accéder à ces médias en même temps que tout le monde.
Une barrière culturelle
Culturellement, pour bien comprendre la différence entre le monde des sourds et celui des entendants, l’exemple le plus parlant à mes yeux et celui de l’humour. Vous aurez beau sortir la meilleure blague de votre répertoire, un sourd restera souvent de marbre. De même, un sourd vous racontant une blague soi-disant hilarante vous laissera perplexe… J’ai déjà essayé et j’ai fait de gros bides !
Il existe donc une barrière culturelle entre les sourds et les entendants. Ce petit fossé se traduit sur Internet sur une difficulté de compréhension.
Un illettrisme omniprésent
L’illettrisme chez les sourds atteint d’un taux phénoménal de 80%. Cela peut paraître incroyable mais c’est bien le cas. Il faut bien se rendre compte que le français tel que nous l’écrivons vous et moi est une sorte de deuxième langue pour les sourds. En effet, la langue des signes est un langue non transposable sur le papier, ainsi les sourds de naissance n’ont pas le réflexe naturel d’associer langage écrit et langage oral.
Le français est pour les sourds comme une deuxième langue, même si les mots sont identiques la construction syntaxique est différente. La LSF fonctionne avec des phrases simples souvent dénuées de conjugaison. Par exemple, dire « J’écris sur Internet » peut se dire en LSF « Moi », « écrire » (sur) « Internet ».
Pour bien comprendre comment se parle la LSF, voici un petit exemple trouvé sur Internet de LSF on l’on voit bien avec la synchronisation voix-signes chaque signes et chaque épellations de noms propres :
De ce fait, lire du français dans le texte pour un sourd peut lui paraître difficile. Le support Internet comme le support papier est un média écrit, complètement différent de mode de communication des sourds qui est entièrement visuel. La nuance peut sembler floue mais elle est fondamentale.
Fort heureusement, l’illettrisme est beaucoup moins répandu chez les jeunes sourds. Et je m’avance peut-être un peu mais il me semble que l’illettrisme se résorbe lentement grâce aux jeunes générations qui ont l’avantage d’être de mieux en mieux encadrés.
Il serait d’ailleurs pessimiste de croire que les sourds soient indubitablement réduit à des problèmes d’illettrisme. Je connais des sourds étant parfaitement bilingues — si on peut utiliser ce mot — mais cela demande beaucoup de travail.
Un handicap, deux alternatives
La réalité de ce handicap est que la population des sourds est divisée en plusieurs catégories :
- Les personnes ne parlant que la LSF
- Les personnes ne parlant pas la LSF
- Les personnes illettrées ne parlant pas la LSF
Pour couvrir l’accessibilité sur ce handicap, il est donc nécessaire de fournir deux alternatives aux contenus sur Internet.
Une alternative en LSF et une alternative sous-titrée via la vidéo. La meilleure illustration de cette mise en place est peu sexy mais efficace, il s’agit de la retransmission des débats de l’Assemblée Nationale. Ces débats sont sous-titrés grâce au Télétexte (cf. partie 1) mais également retranscrit via la langue des signes via un interprète.
Deux types de sous-titres
Il est important de préciser qu’il existe deux manières de sous-titrer du contenu vidéo.
- Pour les mal-entendants
- Les sous-titres dans ce cas vont préciser les sons qui peuvent ne pas être perçus. Exemple : « Cliquetis de clefs » ou « Détonation au loin ». Ce type de sous-titres est apprécié notamment lorsque les sous-titres complets perturbent l’attention du lecteur.
- Pour les sourds
- Les sous-titres dans ce cas vont couvrir l’ensemble des sons : bruits, onomatopées, dialogues, etc.
Dans la pratique, les sous-titres complets sont les plus répandus.
Ces problèmes d’accessibilité étant posés, je vous exposerais dans la suite et fin de cet article, les moyens disponibles pour rendre Internet accessible aux sourds et mal-entendants.
Lire la troisième partie de cet article « Surdité et Accessibilité »
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